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Souvenirs de Eugène Le Gall

Intermède d'une année sabbatique à Casablanca

Retour à Casablanca

Ainsi, en cette journée du samedi 20 Mars 1943, et pour la troisième fois, je me retrouvais chômeur. Il faut dire qu'au bout de quatre ans de guerre, la Transat, comme d'ailleurs toute la flotte marchande française, avait fondu tel du beurre au soleil. Depuis la perte de ses 2 premiers navires, en 1939, le paquebot Bretagne et le cargo Louisiane, la pauvre Louisiane de mes débuts, on ne comptait plus les navires disparus, torpillés, canonnés, saisis ou simplement coulés par "fortune de mer", pour employer le terme juridique.

Chômeur ! Le mot est un peu fort. Car enfin, nous étions en guerre, sous le régime de l'Inscription maritime, et la Transat ne pouvait se débarrasser de nous comme en temps de paix. Nous n'étions pas les seuls d'ailleurs. Le paquebot De la Salle, un des très rares rescapés, comme nous, du bombardement de Casa, avait subi le même sort, du coté de la Sierra Leone. Mais pour lui, cela s'était plus mal terminé. Bien qu'ayant mis plusieurs heures à couler, il y avait eu des victimes. Le second capitaine et un autre membre de l'équipage avaient même péri, dévorés par les requins.

Les naufragés, rapatriés sur Casa, étaient hébergés dans un centre situé sur le boulevard Pétain et portant le même nom : centre Pétain. Un restaurant, dit "Restaurant du poisson", en face le grand marché, avait été réquisitionné pour eux (et nous aussi par conséquent).

Pour les officiers, la Transat avait aménagé un club, avec bar restaurant, et quelques chambres dans un immeuble de la rue de l'Aviation Française, au centre de Casablanca. Le club, à l'époque, était dirigé par le commandant Debuis, qui était commandant sur le St Edmond (ex Storag) au moment du débarquement américain.

Il tenait ce poste depuis le mois de Novembre et aurait bien voulu le libérer, mais les candidats étaient rares, pour ne pas dire inexistants. Il me proposa de prendre la suite ; mais pour moi c'était me condamner à ne plus avoir d'embarquement, au cas où il s'en présenterait un. Je déclinais donc son offre, le plus diplomatiquement possible. D'ailleurs j'allais très vite retrouver un navire, mais quel navire !


©titanne
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Mis à jour le 30 juillet 2010



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